JUGEMENTS :

 

 

ACADÉMIE DES SCIENCES MORALES ET POLITIQUES

SECTION DE LEGISLATION, DROIT PUBLIC ET  JURISPRUDENCE

PRIX remis sous la Coupole de l'Institut, en séance publique, le 19 novembre 2001 :
        
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Le PRIX RENÉ CASSIN, triennal, décerné à l'auteur d’un ouvrage juridique de valeur ou à l'auteur d'une action ou d'une oeuvre civique méritoire,       est attribué à Roger-A. Lhombreaud, Mémoire et destin, fin d'une adolescence en temps de guerre, Paris

 

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8 Lire, au bas de cette page-ci, l’article de l’auteur belge Pierre Bachy

 

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L'un des fondateurs de la Fondation de la Résistance, M. Claude Hallouin, a écrit à l'auteur dès qu'il reçut le texte de Mémoire et Destin :

" Le récit de votre épopée dans la Résistance sera un document inappréciable pour les historiens mais aussi, et surtout, pour les générations à venir… Ainsi, trouveront-elles, au fil des pages, les motivations qui vous ont conduit à refuser l'inacceptable et à agir (tout en conciliant votre horreur de la violence que vous avait transmise votre Père vétéran de la Grande Guerre), dès le début de l'Occupation d'une façon spontanée et instinctive, un peu après, au sein du réseau de renseignement " Centurie " qui dépendait de l'O.C.M. Outre la diversité des formes de résistance évoquées ( réalisation et diffusion de publications clandestines, destruction de matériel allemand, substitution audacieuse de brochures dans une librairie de l'Armée allemande, dépose d'une plaque émaillée du " cours du Maréchal Pétain " remplacée par celle du Général de Gaulle, attitude intrépide en prison allemande, et aplomb crâne devant la Cour de guerre ennemie, puis surtout, collecte et transmission de renseignements militaires...) Le lecteur trouve également relatée une forme de résistance peu connue : celle d'enseignants, comme le Professeur Henri Daudin, qui, entouré de volontaires, dispensèrent clandestinement leur savoir à des élèves exclus comme vous des établissements scolaires par les Allemands… Ce livre restera, en vérité, un très beau trait d'union entre notre génération, et les générations présentes et à venir qui doivent être les récipiendaires de cette mémoire et des valeurs qu'elle incarne. "

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 Bulletin de l'Association des Membres de l'Ordre des Palmes académiques : n° 149 - Juillet 2000. P.51                 

« Mémoire et Destin » par Roger-A.Lhombreaud

Le titre de cet ouvrage s'inspire de ce que disait le général de Gaulle de la nation : une mémoire et un destin.

L'auteur ne se contente pas de décrire son parcours individuel notamment dans la période 1940-1945 apportant son témoignage personnel sur les événements qu'il vécut pendant la Résistance, mais tout bau long de son récit, il apporte ses réflexions sur ce mouvement, à la fois bien et mal connu, qui concentre sur lui la mémoire parfois sélective de ceux qui vécurent cette période de notre histoire.

Le temps passant, même les acteurs parviennent à juger avec plus de lucidité et d'impartialité les choses et les hommes d'alors.

La parfaite écriture de l'auteur produit un livre qui est lu avec un intérêt soutenu, nonobstant des passages évocateurs de souvenirs tragiques, pénibles, insupportables. Mais ce livre est aussi une sorte d'appréciation "philosophique" sur ce moment de notre histoire. En plusieurs endroits, il revient sur cette constatation qui continue de l'étonner et, on le sent, de le tourmenter intérieurement : une Résistance dont l'unité de façade était sapée non seulement par les dissensions internes mais aussi par les réticences de nos alliés eux-mêmes que les sourdes querelles du chef de la France Libre avec Roosevelt ou même avec Churchill ne contribuaient pas à atténuer.

C'est que l'auteur dégage de la Résistance un esprit de la résistance et qu'il place cet idéal très haut pour ne pas regretter ou même condamner tout ce qui peut le ternir. Il voudrait, en somme, que les hommes fussent meilleurs qu'ils ne le sont. Le message délivré n'est pas seulement celui d'un historien de son passé, mais d'un homme qui a réfléchi sur le parcours que les circonstances l'ont conduit à faire "Mémoire et destin". On ne saurait mieux conclure que l'Auteur lui-même : "L'esprit de la Résistance et pas seulement de la résistance française ! mais celui de toutes les résistances au fascisme et au nazisme, mais également celui de toutes les autres formes de résistance contre toutes les oppressions, quelles qu'elles soient, qui voudraient briser l'homme, où que c soit : cet esprit de résistance, donc, est une donnée essentielle qui doit entrer dans toute formation civique des générations de jeunes".

André BOISMENU *

·         Vice-Président du Bureau national de l'AMOPA,

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M. Jean FOYER, ancien Ministre, Président de la Fondation Charles de Gaulle, écrit :

« Votre livre est du plus intérêt.. Votre témoignage de Résistant est bien précieux, comme l'expression des sentiments, bien déçus par la suite ! qui animaient et faisaient espérer le jeune que vous étiez. Jeune, vous l'étiez certes , mais vous avez fait preuve d'une incroyable maturité, et plus tard d'une trop grande modestie en refusant les honneurs. Quel exemple vous êtes ! »

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Dans ne n° 1 de ImagoMundi , 25 janvier 2002 ( voir le site http://Imagomundi.free.fr )

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Roger A. Lhombreaud : Mémoire et destin, fin d'une adolescence en temps de guerre (Editions XXIe siècle-Gutenberg, París)

 

 

Les survivants de la Résistance française ne sont pas légion, et pour cause. Bon nombre d'entre eux ont péri sans arriver à voir les fruits de leur sacrifice. Ces héros de la lutte souterraine contre l'occupant nazi, succombèrent en combat ou furent arrêtés, déportés, torturés à mort, exécutés sommairement…
Heureusement pour l'Histoire - une grand H à la proue - Roger A. Lhombreaud a survécu. Son livre "Mémoire et destin" porte un témoignage poignant sur l'époque de son passage de l'adolescence à la jeunesse.
Etant très jeune, il se refusa à jouer le rôle de spectateur impassible de la réalité par trop pathétique, ce qui l'amena à participer à la création des premiers mouvements de Résistance dans le Sud-Ouest de la France, ainsi qu'à devenir un membre, actif et efficace, du réseau OCM (Organisation Civile et Militaire)
Roger A. Lhombreaud livre au lecteur ses rudes péripéties de jeunesse sous l'Occupation, par le biais d'un récit percutant, mais sobre, où le souvenir ému de ses camarades morts occupe une place importante.
L'Académie des Sciences Morales et Politiques, ayant décerné à Roger A. Lhombreaud le prix René Cassin, cette prestigieuse récompense fut remise à l'auteur de "Mémoire et destin", lors d'une cérémonie, tenue sous la Coupole, le 19 novembre 2001.

 

 

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Extrait de  « La Chaîne littéraire » : Commentaires de lectures : « Au fil du temps » ,

ce long article de Pierre Bachy dans son site http://users.skynet.be/pierre bachy  est reproduit ci-dessous :


Mémoire et destin.

Fin d'une adolescence en temps de guerre

Roger - A. Lhombreaud


Il s'appelait Jacques [ pseudonyme de guerre ] du Lycée Michel-Montaigne de Bordeaux…survivant d'une cohorte anonyme et déjà preque oubliée de Résistants qui ont souffert de l'abomination des tortures et des camps d'extermination…

Dès I94O, la rhétorique de De Gaulle a exercé sur lui un magnétisme prenant pour galvaniser un peuple avec des mots vrais, exprimés dans un style vigoureux et épique au milieu de la débandade générale, c'est l'esprit de résistance, la volonté de ne jamais accepter l'intolérance et l'injustice, la persécution et l'exploitation de l'Homme…C'est le sentiment essentiel de la révolte. Camus l'a formulé : " Dans l'épreuve quotidienne qui est la nôtre, la révolte joue le même rôle que le cogito dans l'ordre de la pensée; elle est la première évidence. Mais cette évidence tire l'individu de sa solitude.Elle est un lien commun qui fonde sur tous les hommes la première valeur. Je me révolte, donc nous sommes ".

En septembre 4O ( avec Robert Q. ), il confectionna des tracts antiallemands…

action interdite…audace…courage ou inconscience…
Quelque temps après, substitution du contenu du livre " Ce que les Français doivent savoir " à l'institut Culturel allemand du livre. Il est entré consciemment dans l'Armée des Ombres. L'inévitable devait se produire ! Le 4 juin, il est arrêté à son domicile par la Gestapo. ..


  Tout au long de son existence, ces minutes, ces heures, certainement, laissèrent une empreinte sur ses réactions, ses pensées, sa volonté, et il se sentira à jamais le frère de tous les torturés de la terre ! Quelle leçon d'humilité ! Il se sentira étrangement frère des démunis de la Terre. Il devient un prisonnier - philosophe et " (…) dire aussi que plus de la moitié de l'humanité dort sur des nattes ou à même le sol…"

Il connaîtra l'ataraxie due à l'épouvante des autres, à l'impassibilité, à la relative inconscience impavide : « (…) les épreuves subies nous ont marqués à jamais, et rien ne sera plus comme avant… »
Lucide aussi ! Il gardera à jamais le remords de tel résistant qu'il venait d'intégrer dans son organisation en I943, qui a été arrêté et a agonisé dans les supplices, à Tours. Et tant et tant d'autres partis vers Drancy et les camps…Il comptera par plusieurs dizaines les camarades qu'il avait, pour la plupart, recrutés lui-même et qui ne rentrèrent jamais de la Nuit et du Brouillard…" Etre homme, c'est précisément être responsable. C'est connaître la honte en face d'une misère qui ne semblait pas dépendre de soi…" écrivait dans Terre des Hommes Antoine de Saint-Exupéry, dont la notion de responsabilité semble avoir été la constante préoccupation. Comment ne pas rester obsédé par ces vies brisées, brisées précisément parce qu'elles ont croisé votre existence ?

Il a choisi l'arme du renseignement, pour ne pas avoir à user dans cette guerre d'une arme réelle et mortelle. Pourtant, il a comme tant de ses camarades, plus de sang sur les mains que s'il avait tenu - reconnaît-il - une mitraillette ! Le comble de sa colère vient du fait que ce sont trop souvent des compatriotes, parfois ses propres amis, qui ont été les victimes des actions dans lesquelles il a été impliqué ! Et que dire de l'assassinat, dans les villes, de gradés allemands avec les retombées abominables sur les otages sans, pour autant, provoquer un sursaut populaire de protestation et de résistance : ceux qui ont ordonné ces actions portent une bien terrible responsabilité, reconnaît-il ! Il gardera cette méfiance d'un monde où il est difficile de rester " pur ", même si l'on est animé par un idéal et par le sens du dévouement à la communauté.
 
  Pour Saint-Exupéry " Le héros, c'est celui qui a compris que toute action relève d'un absolu et que la grandeur du héros c'est de laisser la meilleure part à cet absolu bien que le fondement de l'absolu lui échappe dans l'obscurité du nihilisme contemporain. C'est bien d'une foi qu'il s'agit mais d'une foi perdue dans un monde qui ne s'étonne même plus du silence de Dieu" . Jacques témoigne par un pari qui ne porte plus sur l'infini mais sur lui-même, sur la valeur de l'humanité, découvrant sa solitude, le héros loin de la fuir l'assume comme seule source possible de son existence. Par le paradoxe d'une action continuée, il l'environne de sens et entraîne ses compagnons de route.

La Résistance fut palpitante de vie et d'ardeur, d'enthousiasme et de sacrifice, et il est bon qu'on le dise. Elle fut autre chose que la levée en masse des partisans, des réfractaires, des milices patriotiques. La Résistance fut un esprit, un état d'âme. La Résistance est née d'une chaude, d'une lumineuse rébellion. Elle est la protestation des coeurs généreux contre la raison sordide. Elle est l'élan unanime d'un peuple vers son renouveau. Elle est aussi une splendide page d'épopée

La chose la plus difficile au monde est d'écrire une prose parfaitement sincère sur les êtres humains. D'abord, il faut connaître le sujet; et puis, il faut savoir l'écrire. Jacques a retenu la leçon : connaissance et sincérité. Il nous livre sans détour son autobiographie. Sa mémoire n'est pas oublieuse d'elle-même, déplacée, racornie par le temps qui passe…
 

En écrivant ce livre, l'auteur s'est mis à nu, il a découvert son moi de Résistant, des pans de sa personnalité qui n'étaient jusqu'alors inconnus que par un cercle restreint. C'est bien cela : la vérité de ce qui est raconté est donc le résultat d'un processus entre celui qui raconte et ce qu'il raconte…

Roger Lhombreaud de conclure « du danger d ' INTERPRETER le passé, encore assez récent, avec des points de vue CONTEMPORAINS. Certains historiens actuels commettent des contresens sur cette période et se satisfont d'aberrations anachroniques! Ils veulent juger, 6O ans après, les situations, les perceptions, les appréciations HORS contexte. On est stupéfait de constater le METACHRONISME de certains de nos contemporains. »

« L'esprit de la Résistance et de TOUTES les résistances au fascisme et au nazisme - mais aussi de toutes les autres formes de résistance contre les oppressions qui voudraient briser l'Homme - est une donnée essentielle qui doit entrer dans une formation civique des générations de jeunes, qui doivent, à tour de rôle, prendre conscience de toutes les possibilités qu'ils portent en eux et acquérir une éthique personnelle et citoyenne. »
   


 Notons en conclusion personnelle une appréciation allemande de la Résistance dans le livre du Dr. H.A. Jacobsen, Der zwelte Weltkrieg, Grünzüge der Politik und Strategle in Dokumenten, p. 285, Francfort, 1965 :
" Mais pourquoi les différents mouvements de Résistance ont-ils combattu ? En premier lieu, soutenu par l'approbation de la majorité de leur peuple, ils ont mené un combat national de libération pour une propre patrie. Ils voulaient aider au rétablissement de la liberté et de la souveraineté des nations opprimées. Pour cela, ils ne reculèrent devant aucun sacrifice ni aucune peine. Mais chez eux des motifs humanitaires jouaient également. "
 

 

DEDICACE
Pour la reconnaissance des humbles 

«  Une monstrueuse injustice, contemporaine des premiers âges, rejetait dans l’oubli la masse énorme des vivants qui sont la substance de l’Histoire et ne laissait émerger, au dessus de la douleur anonyme, que quelques élus. Eux seuls, par la succession éclatante de leurs actes, pouvaient se permettre un hautain dialogue avec le Temps, eux seuls entraient dans les secrets de ce fleuve inconnu, tandis que tous les autres étaient condamnés à un piétinement sans date et sans mémoire…
Il semble que désormais cette image primitive et inhumaine ait craqué sous la poussée de la conscience unanime…
Chaque citoyen, sur l’horloge tournante de la terre, se sent comme délégué à la représentation d’un fragment de la durée, à la garde fugitive d’une seconde, à la manœuvre d’un éclair particulier…. »
Jean Tardieu : La Part de l’Ombre : "Image du Temps"
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RADIO FRANCE : Revue de Presse des livres , 15 mai 2000 : 
36 15 Radio France : taper RDPL / www.radio-france.fr rubrique "Dédicaces" : 15 mai 2000 
Roger-A. Lhombreaud : MÉMOIRE ET DESTIN : Fin d'une adolescence en temps de guerre 
Collection Gutenberg XXIème siècle, Paris, Imprimerie nationale, 2000. 276 p ISBN 2-84558-019-3